[CORSE NET INFOS] Covid-19 : La CCIC travaille à un plan de sauvetage de l’économie corse

[CORSE NET INFOS] Covid-19 : La CCIC travaille à un plan de sauvetage de l’économie corse

Suite à la crise sanitaire, la Chambre de commerce et d’industrie de la Corse (CCI de Corse) a décidé d’élaborer un plan de redémarrage et de relance de l’économie de l’île. Lundi, à l’antenne de Corte, elle a présenté les travaux du Cabinet EY & Associés qui a réalisé une étude de terrain et lister les actions à mener. L’idée est de tabler sur 12 filières stratégiques et la spécificité du territoire pour proposer des mesures adaptées, réalistes, concrètes, finançables et immédiatement applicables. Un plan en trois phases, conçu comme un argumentaire armé dans les négociations avec la Collectivité de Corse et Bercy. Explications, en vidéo, de Pierre Orsini, président de la Commission Entreprises & Territoires de la CCI de Corse.

Les présidents de la Chambre de Commerce et d’industrie de Corse, Jean Domininci et Paul Marcaggi, et le président de la Commission Entreprises & Territoires, Pierre Orsini.

« Il faut sauver l’économie corse de la faillite, maintenir les emplois et agir sur ce qui reste de cette saison touristique. Aujourd’hui, nous sommes réunis parce que les entrepreneurs, les artisans, les commerçants, les agriculteurs ne peuvent, en aucun cas, attendre que s’arrête cette crise sanitaire ». Le préambule de Pierre Orsini, président de la Commission Entreprises & Territoires de la CCI de Corse, pose, à lui seul, la gravité de la situation de l’économie corse après trois mois de confinement et une crise sanitaire mondiale qui ont ébranlé tous les secteurs d’activité.

« L’Etat, la Collectivité de Corse (CdC) et la CCI ont su réagir, dès le 30 mars par toute une série de mesures garrot qui nous ont permis de ralentir l’hémorragie sans véritablement la juguler. Mais voici le moment post-traumatique, au-delà de l’urgence de la remise en route de notre économie, qui nous projette sur le plus long terme. Il va falloir tirer parti de cette respiration imposée pour redonner à l’économie corse visibilité et confiance ».

La CCI a, donc, initié une étude au cabinet conseil EY & Associés, qui travaille avec Bercy, et qui a été présentée, lundi matin, à l’antenne de Corte, en présence du président de la CCI régionale, Jean Dominici, du vice-président, Paul Marcaggi, et du Directeur général, Philippe Albertini.

Deux sombres rendez-vous

La crainte d’un impact cataclysmique de la crise sanitaire sur l’économie corse s’appuie sur de sombres projections pour les deux filières les plus à risque : tourisme et nautisme, mais aussi pour l’aéronautique. Près d’un tiers des 20 000 entreprises insulaires sont fragilisées par le manque de trésorerie et 3000 emplois sont menacés. La perte potentielle de chiffre d’affaires pourrait atteindre 80 % dans le tourisme, 60 % dans les transports, 50 % dans le BTP et le commerce. Deux rendez-vous sont particulièrement cruciaux : « Le premier, c’est celui de la fin de saison. Le second, c’est celui du mur de dettes qui est fixé au printemps 2021. 700 millions € ont été souscrits en Corse dans le cadre du PGE (Prêt garanti par l’Etat) qui est à l’horizon d’un an. La première échéance est en mai 2021. On sait bien que l’économie corse ne sera pas prête à l’absorber sans dégât. Il faut s’y préparer. La saison, quoi qu’il en soit, ne répondra pas à la part du PIB que représente le tourisme : 30% de 9 milliards €, soit 2,5 milliards €. Cette année, il faudrait au moins en faire la moitié. Il faudra qu’en septembre, nous ayons les moyens de soutenir la partie qui ne sera pas réalisée en chiffres d’affaires marchands pour que l’économie ne soit pas privée de ce carburant dont elle a pris l’habitude de se nourrir », commente Philippe Albertini.

Une mobilisation inédite

D’où la démarche initiée par la CCI de Corse. « Le plan d’urgence était destiné à activer des mesures de court terme, de défense et de réouverture, en complément et en partenariat avec les dispositifs de l’Etat et de la CdC avec principalement 4,4 millions € pour la reconnexion aérienne, 1,5 million € pour le fonds Sustegnu et 1 million € pour la reconnexion maritime. Il est apparu tout aussi indispensable de travailler sans attendre au redémarrage et à la relance de l’économie… dans une démarche aussi nouvelle qu’ambitieuse », précise Jean Dominici. L’étude a défini trois cibles : identifier l’impact de la crise sur l’économie corse et les attentes des entreprises, élaborer un plan qui prenne en compte les spécificités de l’île, et définir des mesures opérationnelles sur 3 ans en mobilisant tous les acteurs. « Ces travaux reposent sur une mobilisation forte des entreprises et des acteurs du territoire. 1746 entreprises ont répondu, soit une participation totalement inédite dont l’ampleur et plus encore la qualité ont surpris nos consultants », poursuit Jean Dominici. A ces réponses de 22% des entreprises insulaires se sont ajoutés, notamment, 26 entretiens avec des acteurs-clés et 20 contributions écrites.

Des mesures réalistes

Deux maîtres-mots : efficacité et spécificité. « Nous avons adopté comme parti-pris : l’essentiel pour identifier les mesures de redémarrage de notre économie avec un plan construit autour de 3 piliers et 12 filières pour transformer le destin de la Corse. Les 4 filières clés : Tourisme, Commerces & Services de proximité, BTP, Transports & Logistique. 3 filières souveraines : Santé & Silver économie, Energies & Développement durable, Agri/Agroalimentaire. 5 filières d’avenir : Industries culturelles & créatives, Numérique, Aéronautique, Nautisme, Cosmétique. Cette stratégie se déploiera en trois temps avec un objectif opérationnel fort et des mesures réalistes, concrètes, finançables et immédiatement applicables », explique Pierre Orsini.

Et six principes directeurs : soutenir les entreprises en difficulté, sécuriser la réussite d’une saison touristique élargie, soutenir le redémarrage des filières stratégiques, accélérer le rééquilibrage économique par le soutien à la compétitivité des filières d’avenir, disposer de leviers fiscaux et règlementaires plus importants pour accélérer la résilience du territoire compte tenu de ses spécificités, réussir en 5 ans la réorientation des emplois et des compétences vers les besoins de l’avenir, notamment numériques. L’idée centrale est de transformer le modèle économique corse et de l’organiser en filières pour mieux l’adapter à la réalité d’une concurrence extérieure féroce, comme l’explique Pierre Orsini à Corse Net Infos :

Un bras armé

La crise sanitaire remet en cause le monde ancien. « Nous mettons tout en œuvre avec les compétences nécessaires et la CDC pour un redémarrage très fort. Au-delà, il faut des projets qui feront la société de demain, une société qui ne sera plus comme avant comme nous l’a fait comprendre la crise sanitaire. Nous sommes obligés de réfléchir à d’autres stratégies qui passeront par l’adoption de technologies, une priorité au développement durable et à l’urgence climatique. Tous ces projets, sur lesquels nous avons déjà travaillé et que nous mettrons en œuvre avec la CdC, sont identifiés. Nous sommes là en tant que force de propositions », indique Paul Marcaggi.

Ces propositions, qui seront présentées avant la fin de juillet, sont conçues comme le bras armé de la CCI à la table des négociations avec le gouvernement et même avec la CdC, un argumentaire pour objectiver et fonder les demandes. L’idée de la CCI est de s’inscrire ainsi de manière solide dans le plan de relance de l’économie française que prépare le gouvernement en obtenant des mesures adaptées pour la Corse.


Nicole Mari

Voir l’article et l’interview sur Corse Net Infos