La Lettre | Antonia Luciani, la culture de la formation

La Lettre | Antonia Luciani, la culture de la formation

La conseillère exécutive en charge de la culture et de la formation a un vaste chantier ouvert devant elle. Pour certaines de ses futures actions, elle compte sur le soutien et l’expertise de la CCI de Corse. 

Le long cours d’une vie et d’une carrière prend souvent sa source sur le lieu même de sa naissance, son histoire, ses traditions, ses richesses naturelles et humaines. Comme si l’environnement qui berce l’enfance contribuait, au-delà d’une bonne éducation, à façonner une personnalité et esquisser un destin. L’attachement viscéral d’Antonia Luciani pour la géographie, la culture et le patrimoine trouve probablement son origine là où elle a vu le jour, le hameau marin d’Osani, Girolata, aux confins du Golfe de Porto, ce diamant bleu de la Corse cristalline précieusement rangé dans le coffre à bijoux de l’Unesco. Les études elles-mêmes de la jeune conseillère exécutive ressemblent à son paysage intérieur avec la géographie pour matière principale – grâce à laquelle elle a obtenu sa meilleure note au terme de son parcours littéraire bastiais khâgne hypokhâgne – d’abord à la Sorbonne puis à l’Institut de géographie alpine de Grenoble. Une fois le diplôme de géographe-urbaniste en poche, elle rentre à la maison, à Osani, où le maire et député européen, François Alfonsi, lui propose un poste de stagiaire au Parlement de l’Europe. Nous sommes en 2009 et elle partagera les quatre premières années de son itinéraire professionnel entre Strasbourg et Bruxelles. Conseillère politique du groupe écologiste et progressiste ALE, qui réunit sous sa bannière les parlementaires de régions autonomistes et des peuples minoritaires, elle est chargée plus particulièrement de la diversité culturelle et linguistique. Ainsi, elle continue de porter son idéal corse en bandoulière malgré une distance, à vol d’oiseau, de quelque mille cinq cents kilomètres. « Ce fut une expérience humaine et politique inoubliable » dont la suite s’est écrite naturellement…

L’ORIENTATION ET LA FORMATION POUR HORIZON

De retour en Corse en 2013, elle renoue avec son univers de prédilection, l’Agence de l’urbanisme, où elle apporte sa pierre à l’édification patiente du Padduc. Un travail de bénédictin. Mais la politique au sens le plus noble du terme est, chez Antonia Luciani, une seconde nature. Son père est un militant autonomiste de la première heure et les causes qu’elle porte avec conviction au Parlement européen lui confèrent des affinités avec la mouvance nationaliste et ses deux grandes familles, le PNC puis Femu a Corsica. Première… non-élue sur la liste de Gilles Simeoni en 2015, les événements électoraux lui réservent une trop brève apparition au sein de l’hémicycle territorial en 2017. Ce n’est que partie remise. Deux ans plus tard, un fauteuil à haute responsabilité de conseillère exécutive en charge de la culture, du patrimoine, de l’éducation et de la formation l’attend. La mandature de sept ans ne sera pas de trop pour relever l’énorme challenge qui se présente à elle. Le premier chantier constitue à lui seul un jalon fondamental pour l’avenir : le Contrat de plan régional de développement, de la formation et de l’orientation qu’elle soumettra à l’approbation de l’Assemblée de Corse dans le courant de l’année prochaine. « Les comités locaux que nous avons mis en place permettent d’être au plus près des bassins d’emplois et de vie pour élaborer les diagnostics les plus fins à partir desquels sera conçue, dans la concertation, la stratégie la plus efficace. C’est un travail collectif de la Collectivité de Corse qui met en synergie l’Agence de tourisme, l’Agence du développement économique, l’Office de développement agricole mais aussi Pôle Emploi et les communautés de communes qui, sans avoir la compétence juridique, sont très réceptives et déterminées à apporter une aide précieuse… » De ce contrat de plan, la formation est un élément constitutif majeur. Confrontée aux problèmes générés par la mobilité dans une île géographiquement contrainte et au coût de la vie élevée, la formation a pu se délocaliser grâce aux technologies de la communication, notamment dans les domaines du sanitaire et du social. « Nous nous attelons à la rendre accessible progressivement à tous les secteurs… »

AVEC LA CHAMBRE, LES CHAMPS DU POSSIBLE…

Le tourisme est l’activité économique transversale par excellence à tous les bassins de vie et la problématique de la formation y est omniprésente en raison des difficultés chroniques du recrutement. 

« L’Agence de Tourisme et la CCI de Corse sont des partenaires incontournables pour aller de l’avant mais il faut, en amont, mener une négociation avec les branches professionnelles du secteur dans un souci d’harmonisation et de cohésion et faire un travail pédagogique auprès des jeunes, leur montrer que les métiers de l’hôtellerie et de la restauration peuvent donner du sens à leur vie grâce à des conditions attractives en termes de salaires, de progrès social, d’épanouissement personnel. » Antonia Luciani a notamment à l’esprit la création d’une grande école hôtelière, avec des installations physiques et virtuelles, pour des formations plus valorisantes que par le passé et plus en phase avec les enjeux de la transition écologique. Elle confirme que d’autres connexions sont possibles et même souhaitables avec notre institution. « La Collectivité de Corse a une mission essentielle dans le domaine de l’orientation. Nous travaillons main dans la main avec les autorités académiques sur plusieurs actions comme le « Printemps de l’orientation », mais il est possible de concevoir des initiatives communes avec les acteurs économiques à travers la chambre consulaire. Les premiers échanges formels sont encourageants et un outil aussi formateur que celui de la CCI Formation Corsica ouvre des champs de coopération dans le cadre de la stratégie régionale relative à l’offre de formations. Plus encore dans la perspective de la fusion des chambres au sein de la Collectivité de Corse. » L’élue de la majorité territoriale est d’autant plus à l’aise dans ses fonctions exécutives que ses liens à la fois techniques, politiques et même personnels avec la culture – elle a toujours fait du théâtre et du chant lyrique – l’autorisent à imaginer des formations attractives et variées, à l’exemple de la filière  « audio-visuelle et cinéma » pour laquelle la Corse apparaît comme un décor idéal mais insuffisamment exploré. Elle-même, habitée par une vitalité et des désirs artistiques, pourrait endosser le rôle de productrice. Productrice d’idées, d’actions, d’engagement, d’avenir.

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°22 (Juin 2022) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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