La Lettre | Portrait d’entreprise : Corstyrène, souffleur de vert

La Lettre | Portrait d’entreprise : Corstyrène, souffleur de vert

La société située à Aléria s’affirme comme un modèle économique depuis plus de cinquante ans. Spécialisée dans l’isolation des bâtiments, elle relève le challenge de l’avenir en produisant de l’hydrogène vert.

Mille paroles sont une goutte d’eau, un acte est une pépite d’or. Ce sage proverbe tibétain mériterait d’être gravé au fronton de Corstyrène, une des plus solides et plus exemplaires entreprises de la Corse sur le terrain pourtant mouvant de l’écologie, de la frugalité énergétique et de l’abstinence en carbone. Installée depuis plus d’un demi-siècle en Plaine orientale, à Aléria, au coeur d’un parc photovoltaïque de sa création, elle est spécialisée dans la confection des matériaux d’isolation à base de polystyrène expansible à destination du bâtiment. Elle s’est donnée pour principe intangible de mener une existence verte et vertueuse, préférant, pour ce faire, l’action à l’intention. La preuve : elle produit pratiquement trois fois plus de courant qu’elle n’en consomme, organise le tri sélectif de tout ce qui s’utilise sous son toit, recycle et valorise les chutes de polystyrène, régénère l’eau dont elle se sert dans sa chaîne de production – affranchie de tout adjuvant toxique – collectionne les certifications les plus exigeantes, déploie sa production en circuit court, s’éclaire exclusivement en LED et surmonte un à un les obstacles pour s’engager dans l’aventure de la production d’hydrogène vert, salutaire à moyen terme pour l’économie et l’environnement de la Corse. Récemment, la société a rallié le cercle fermé de la CEC, la Convention des entreprises pour le Climat. « L’écologie est désormais inscrite dans notre ADN. Rien de ce qu’on entreprend, rien de ce qu’on investit ne s’accompagne de la volonté affirmée de réduire encore et encore l’empreinte carbone. Contre le réchauffement climatique, nous faisons le maximum. Mais nous estimons que la marge de progression est toujours possible pour produire moins et mieux » confie Sophie Guillot, directrice générale de Corstyrène.

UN MODÈLE ANTI CO2 

Corstyrène a été fondée voici 52 ans par Even Guillot, un entrepreneur visionnaire disparu en juin dernier. Son fils a repris le flambeau d’un groupe leader dans le secteur de l’isolation, son coeur de métier, qui a des ramifications en Sardaigne et dans le Var. La réglementation thermique européenne de plus en plus draconienne, la construction subordonnée à la basse consommation et le souci, partagé à grande échelle, de mieux isoler pour économiser l’énergie a dopé l’activité de la société : « En 20 ans, nous avons quasiment triplé notre production d’isolants » confirme Sophie Guillot. Non seulement l’outil industriel est performant mais il s’impose comme un modèle anti CO2 ! Chaque année, elle fait venir 80 camions de matière première (en provenance de France, d’Allemagne et des Pays-Bas) pour fabriquer la large gamme de ses isolants mais si elle n’existait pas, les besoins de la Corse seraient de 1 800 camions. Par ailleurs, elle recycle la totalité de ses chutes de polystyrène expansé pour les réintégrer dans le process de sa fabrication. Elle alimente les grandes enseignes de matériaux de construction présentes dans l’île réussissant ainsi l’alliance entre circuit court et économie circulaire qui assujettit le bilan carbone aux enjeux climatiques. La pérennité de la société est assurée : une bille de polystyrène est constituée d’air à 98% ! « Une matière indestructible à la stabilité thermique illimitée. Trouver mieux, c’est possible mais ce serait plus cher et plus polluant. »

L’HYDROGÈNE, PLANCHE DE SALUT

Fidèle à ses principes d’innover au double bénéfice de la protection de la planète et de l’économie de la Corse, l’entreprise s’est lancée depuis cinq ans dans la production d’hydrogène vert qui s’épanouit dans son vaste jardin solaire. Elle est précurseur en la matière. « Nous avons répondu à un appel à projet national et nous avons été sélectionnés avec trois autres entreprises françaises. Ce succès nous a permis de réaliser une première station de production quotidienne de 4 kilos d’hydrogène destiné à la mobilité. » Ainsi, grâce à Corstyrène Energy, sept chariots élévateurs du site industriel d’Aléria, équipés de piles à combustible, fonctionnent à l’hydrogène vert. Bientôt ce sera toute la flotte. « Pour un territoire insulaire qui, par nature, a de fortes contraintes d’accès, c’est l’avenir. » Sophie Guillot annonce, avant cinq ans et grâce au concours de plusieurs partenaires, la réalisation d’une nouvelle station de production, toujours en Plaine orientale, pour proposer aux collectivités locales et aux sociétés de transport de rouler à l’hydrogène vert. La CCI de Corse y voit un intérêt de tout premier plan et une connexion possible avec ses propres projets. L’hydrogène, c’est de l’électricité que l’on peut stocker sur les ports d’Ajaccio et de Bastia. Un enjeu majeur pour annihiler les émissions nocives générées par le trafic maritime. Par la densité de leurs activités, les zones portuaires sont des lieux privilégiés pour accélérer le déploiement massif de la filière hydrogène. En retour, l’hydrogène permettra aux ports de répondre à leurs enjeux de décarbonation, de diversifier leur économie et de renforcer leur attractivité. Précisément l’ambition de notre chambre qui, à travers ce coup de projecteur sur Corstyrène, met en lumière une entreprise performante, réactive et audacieuse.

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L’entreprise Corstyrène en Corse, c’est :

  • 46 salariés
  • 1 700 tonnes annuelles de produits isolants
  • 120 000 logements isolés
  • 20 millions de chiffre d’affaires
  • 1,5 millions investis dans la station d’hydrogène (phase I)

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°28 (janvier 2023) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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