La Lettre | Transport : Figari, la révolution copernicienne
Après Calvi, le président du Conseil exécutif de Corse a prêché la bonne parole de la desserte aérienne de service public à l’aéroport Sud-Corse où les annonces ont été à la hauteur des attentes.
« Avec la longue série d’annonces que nous venons d’entendre, vous donnez des signes forts et tangibles du changement tant attendu »
Jean Dominici, président de la CCIC – Figari, mardi 11 avril 2023
Il y a bien un pilote dans l’avion. Sur la piste d’envol à destination de la nouvelle DSP 2024-2027, Gilles Simeoni a réitéré à Figari ce qu’il avait fait six jours plus tôt à Calvi : accéder aux attentes les plus fortes mais aussi les plus légitimes des élus, des acteurs économiques et de la population en matière de transport aérien et, dans l’Extrême-Sud, le fossé à combler était plus profond encore que celuideBalagne.Un exercice de haute-voltige auquelle président du Conseil exécutif de Corse est rompu.Avant même l’examen à l’Assemblée de Corse – quin’est jamais une formalité lorsqu’il s’agit des transports -il a posé sur le tapis (roulant) un bagage de mesures concrètes qui ont rassuré les esprits après un accueil aussi imbibé de prudence que le furent les premiers mots de Jean-Christophe Angelini, le président de la Communauté de communes Sud-Corse, soulignant des«infrastructuresdépasséesvoiredangereuses»et des « carences » en matière d’obligations de service public. Par ailleurs, une plateforme aéroportuaire a vocation à être un outil de rayonnement et de développement pour toute une région et, à ce propos, Jean Giuseppi, maire de Figari, estime que le niveau des équipements publics et privés n’est pas tout à fait à la hauteur d’un aéroport international.
PARIS-ORLY : LES PENDULES À L’HEURE
Dans un silence de cathédrale, Gilles Simeoni a déroulé sa feuille de route pour Figari. Les points forts du cahier des charges : deux liaisons supplémentaires par semaine sur Marseille et Nice, une amplitudehoraireélargiepoureffectuerl’aller-retourdans la journée sur Nice et sur Paris, une offre de plus de 12 000 sièges supplémentaires sur Paris-Orly pendant la saison estivale et, pour ce faire, il en a appelé à l’effort d’Air France et d’Air Corsica, les compagnies délégataires historiques, pour se mettre au diapason des besoins de la population. « La politique aérienne de la Collectivité de Corse s’est toujours appuyée sur un service public fort et fiable et il est hors de question de le remettre en cause y compris l’été comme certains pourraient le souhaiter, car c’est la conjugaison entre notre capacité de transport des résidents et les retombées économiques estivales qui fondent la singularité de notre système. Or la demande estivale sur Paris-Orly n’est qu’imparfaitement couverte par Air Corsica et Air France alors que ces deux compagnies bénéficient de l’exclusivité de la desserte. » Ainsi, de juin à septembre, dès lors que le taux de remplissage dépasse 85 %, elles seront tenues de prévoir des vols supplémentaires. Un scénario qu’elles sont invitées à anticiper dans leurs plannings dès à présent. « En accord avec la CCI de Corse, j’ai également demandé que les compagnies se voient octroyer la possibilité logistique de programmer en été des gros porteurs à Bastia et à Ajaccio et d’affecter les moyens porteurs rendus disponibles sur Calvi et surtout sur Figari.»Message reçu cinq sur cinq par un auditoire qui n’avait pas fait le voyage pour rien.
«UN DÉVELOPPEMENT SOLIDE ET INTELLIGENT »
Par ailleurs, dans un secteur où les coûts, comme les avions, ne cessent de s’envoler, le président du Conseil exécutif a confirmé l’augmentation modique de 5 euros sur les titres de bord à bord et sa volonté de sensibiliser l’État sur deux points-clés : la fiscalité écologique pour laquelle la Corse ne saurait être traitée à tort comme sur le continent, et l’enveloppe de Continuité territoriale pour laquelle la hausse des carburants justifie à elle seule une rallonge. Le chapelet de mesures positives ainsi égrenées ne pouvaient que satisfaire le présidentde la CCI de Corse, conscient que la situation de Figari était vécue comme une injustice. « Je me suis souvent fait l’interprète des difficultés rencontrées ici depuis plusieurs années face à une croissance contrariée par un ensembledeverrous quin’ontpas été levés malgré leurs conséquences : obsolescence et insuffisance des installations, sous-dimensionnement des services de l’État sur le site, paramétrage inadapté et mauvaises conditions d’exploitation de la desserte publique en raison de l’obstination des compagnies citées. Une réforme de fond était attendue. Aussi, nous accueillons avec beaucoup d’intérêt et de satisfaction la longue série d’annonces qui nous déleste de la chape de plomb qui pesait sur nos têtes. »
Jean Dominici rappelle la nécessité d’investir rapidement sur les superstructures et sur l’ensemble des fonctions de la plateforme du Sud-Corse afin d’assurer à Figari un développement « solide, raisonné et intelligent ». Il prend lui-même l’enga-gement que la chambre allait, de son côté, multiplier les initiatives pour allonger les saisons et développer le réseau hors OSP. « Déjà, conclut-il en s’adressant au président du Conseilexécutif,vous avez parfaitement compris la révolution copernicienne qu’il fallait engager. »Figari, au coeur de l’Extrême-Sud, se fait une place au soleil. Ce soleil que Copernic plaçait, il y a déjà cinq cents ans, au centre de l’Univers…
LES NOUVELLES OSP PLÉBISCITÉES
Devant l’Assemblée de Corse où il pré-sentait le 27 avril dernier son rapport, Gilles Simeoni a su se montrer convaincant puisque c’est à l’unanimité des votants (47 voix pour,13 absentions) quel nouveau
cahier des charges de la DSP aérienne 2024-2027 a été adopté. Le maintien du périmètre de service public, l’évolution à la marge du tarif résident, l’augmentation de l’offre en sièges et la garantie d’un aller-retour dans la journée avec une latitudehoraire appréciable sur les quatre aéro-ports, ont rassuré les conseillers territo-riaux. Les réunions de concertationavec les élus locaux et les forces vives, comme ce fut le cas à Calvi et à Figari, auront favorisé ce plébiscite pour une desserte qui correspond aux attentes des Corses et qui, pour reprendre lesmots du président du Conseil exécutif, est « efficace, de qualité, économiquement maîtrisée et vertueuse en termes de transition écologique et de développe-ment durable.»
DES INVESTISSEMENTS INDISPENSABLES
Figari doit grandir. Ouvert en 1975, il était à l’époque dimensionné pour accueillir idéalement 500 000 passagers par an. Presque cinquante ans plus tard, il en accueille le double – record historique – et l’aéroport, qui occupe la première place nationale post crise sanitaire en termes de croissance, est loin d’avoir atteint son plafond de verre. Rien que cette année, elles sont 11 compagnies à desservir 40 destinations dont 12 internationales !Des travaux ont été réalisés à hauteur de22 millions (58 % Collectivité de Corse,25 % CCI de Corse et 17 % État).D’autres sont programmés à court terme(extensions, mises aux normes) pour uncoût similaire.7
ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°32 (mai 2023) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE
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