La Lettre | L’optimisme n’est pas de saison

La Lettre | L’optimisme n’est pas de saison

Pour Karina Goffi, présidente de notre commission tourisme et de l’UMIH Corsica, les perspectives ne sont pas, à ce jour, réjouissantes.

  • Comment se dessine la saison au niveau des réservations ?

Elle s’annonce médiocre, moins 30 % pour certaines périodes de la saison. Les gîtes et l’hôtellerie de plein-air ne sont pas mieux lotis. Au moment où on se parle, le niveau des réservations pour juillet et août est catastrophique et ce, dans l’ensemble des microrégions de l’île à de très rares exceptions près. De fait, certains établissements ont ouvert tardivement.

  • Vous avez un début d’explication ?

Lorsqu’on interroge nos ressortissants, trois causes reviennent régulièrement, le prix des transports, le paracommercialisme et les difficultés de recrutement. La CCI de Corse peut jouer de son influence pour surmonter ces obstacles, particulièrement celui de la concurrence déloyale de l’hébergement non marchand qui ne cesse de gagner du terrain dans une indifférence coupable.

  • S’agissant du recrutement des saisonniers, la situation n’a pas évolué ?

Aucun établissement aujourd’hui n’a été en mesure de boucler correctement son recrutement. Souvent, les candidats acceptent de travailler deux semaines à un endroit puis deux semaines à un autre et ainsi de suite. Ils font le tour de Corse à nos dépens et on n’y peut rien. Le projet que porte la chambre sur une grande école de tourisme et de l’hospitalité haut de gamme est une excellente nouvelle. Il faut juste préciser aux restaurateurs d’Ajaccio que le restaurant d’application ne mordra pas sur leur clientèle, sa vocation est exclusivement pédagogique.

  • La flambée des coûts, de l’énergie notamment, c’est un facteur aggravant ?

Malgré les aides de l’État, sortir de deux années de crise, ce n’est pas simple. Par ailleurs, les salaires ont augmenté ainsi que les prix, que ce soit l’électricité, le linge ou les denrées alimentaires jusqu’à 25 % de plus pour certains produits. De notre côté, nous n’avons pas anticipé. Les tarifs de 2023 ont été fixés et communiqués aux agences et tour-opérateurs en septembre 2022. Les marges seront par conséquent réduites. Pour diminuer les factures énergétiques ou développer le tri sélectif, il faudrait que les aides soient davantage adaptées à nos besoins.

  • Les réseux sociaux distillent une détestation du tourisme. Le phénomène vous préoccupe ?

Oui, mais ce n’est pas le tourisme qui arrive dans nos hôtels, la preuve ils sont presque vides. Ce qui est en cause, c’est la croissance exponentielle de la location meublée qui produit la surfréquentation et indispose jusqu’à l’Agence de Tourisme qui a choisi de ne plus faire la promotion de la haute saison estivale. Selon les propres statistiques de l’ATC, l’augmentation des locations meublées a été estimée à 14 % en un an. Ce phénomène qu’on a pourtant vu venir, fait flamber les prix du foncier et de l’immobilier et crée une économie occulte. Il est grand temps de prendre le problème à bras-le-corps.

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°33 (juin 2023) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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