La Lettre | Emmanuel Macron en Corse – Nouveau statut, nouveau modèle

La Lettre | Emmanuel Macron en Corse – Nouveau statut, nouveau modèle

Autonomie et économie vont de pair, la CCI de Corse l’a rappelé. Le Président de la République le sait et il souhaite agir dans ce sens. Il l’a laissé entendre à la délégation consulaire avec qui il a échangé place Saint-Nicolas…

« Je sais que la saison a été difficile, mais on a six mois devant nous pour travailler et voir ce qu’il est possible de faire ensemble… » 

Il est précisément 18h10 lorsqu’Emmanuel Macron, après une longue et émouvante cérémonie à la mémoire des Résistants, serre chaleureusement la main de Jean Dominici. Visiblement, il connaît tous les visages de la délégation consulaire. Gérald Darmanin est sur ses talons, à l’écoute lui aussi. Six mois. C’est donc le délai imparti aux élus qui balaient tout le spectre idéologique de la Corse pour accorder leurs violons sur le texte constitutionnel qui sera soumis au Parlement. C’est aussi à l’évidence dans son esprit le laps de temps pour permettre aux organismes économiques du territoire de mettre des propositions sur la table. Place Saint-Nicolas, une séquence « économie » brève mais suffisamment révélatrice de la volonté présidentielle 

de progresser sur ce terrain et pas exclusivement sur celui des institutions. Il est vrai que dans son discours de quarante minutes à la tribune de l’Assemblée de Corse, l’économie n’apparaissait qu’en filigrane sinon à la faveur de l’annonce, spectaculaire, d’un nouveau plan d’investissement, annonce qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Il en a fait davantage état le lendemain à l’hôtel de Ville de Porto-Vecchio : « La Corse a énormément de perspectives économiques devant elle. Il faut lui donner les moyens de construire un tourisme durable. Alors, ne lâchez rien ! »

À PROPOS D’ÉVIDENCE INSTITUTIONNELLE…

Le Président de la République n’était pas en terre inconnue. Il ne découvre pas que l’insularité, l’étroi-tesse du marché intérieur et l’hypersaisonnalité constituent les trois principales contraintes d’où découlent les écueils qui minent l’économie et nourrissent le constat d’iniquité avec le Continent (de l’ordre de 10 % pour les surcoûts et de 700 millions par an au niveau du chiffre d’affaires global). Seul le réflexe de protection auquel se greffe un tropisme de résilience génère moins d’endettement et plus de productivité.

Quelques jours avant sa visite, le chef de l’État avait été rendu destinataire d’une note synoptique de la CCI de Corse qui dit l’essentiel du tissu économique de l’île, des besoins et des attentes de celles et ceux qui en sont la trame. Il y est notamment décliné toute une série de mesures d’accompagnement. Elles peuvent être référencées en quatre verbes qui ne se conjuguent qu’au futur : investir, recruter, innover et exporter. Avec un effort particulier à consentir à destination de la transmission d’entreprises et des jeunes dont l’illustration la plus éloquente est la création d’une grande école hôtelière (tourisme, évènementiel et hospitalité) au Palais des Congrès d’Ajaccio. 

Dans le document stratégique adressé à l’Élysée par notre institution, il est aussi question de concrétiser la politique des grands équipements (entre autres, le projet de Portu Novu à Bastia et le fond de baie d’Ajaccio) et du rapprochement des chambres consulaires au sein de la matrice territoriale : « Une articulation plus simple et plus efficace entre la Collectivité de Corse et la CCI de Corse apparaît non seulement comme une réelle opportunité d’amélioration des outils et des politiques publiques mais comme une évidence institutionnelle. » Le dossier peine à aboutir. Pourtant, cette « évidence institutionnelle » colle parfaitement au souhait présidentiel d’inventer une autonomie singulière, « à la Corse ».

Une Corse qui rayonne en Méditerranée

La communication consulaire parvenue au sommet de l’État et intitulée « Économie corse : les défis de la mise en mouvement », milite pour un plus grand rayonnement de la Corse dans son environnement méditerranéen : « Pour donner du sens à la mise en mouvement économique, il sera déterminant de travailler à renforcer la place, le rôle et la fonction de la Corse en Méditerranée. » Les conventions de partenariat passées par la Collectivité de Corse avec la Sardaigne et la Toscane montrent que cette vision est partagée : « Permettons à la Corse de se réinscrire, de façon naturelle et apaisée, dans son destin méditerranéen » a déclaré Gilles Simeoni juste avant de céder la parole au Président de la République. Avec d’autres mots, Emmanuel Macron ne dit pas autre chose : « Nous refermerons une page marquée par des heures sombres pour en ouvrir une autre, celle d’un nouvel élan vers la République et la liberté, vers la Méditerranée et vers l’avenir. Car l’inscription en Méditerranée de la Corse doit composer une part majeure de son destin. La Corse, par sa beauté, par l’accumulation de civilisations et d’ouverture reçues en legs des siècles passés, par la fièvre créatrice de sa jeunesse et de ses artistes, a toute sa place dans cette ambition essentielle pour nos intérêts stratégiques, dans nos relations avec toutes les rives de la Méditerranée. » Que dire de plus…

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°36 (octobre 2023) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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