[CORSE-MATIN] Le chef de l’État très attendu sur le volet économique

[CORSE-MATIN] Le chef de l’État très attendu sur le volet économique

Dans un contexte de crise inédit, alors que plus de 3 000 entreprises insulaires seraient au bord du dépôt de bilan et que le plan de relance proposé par la CCI est évalué à 2,5 milliards d’euros, les acteurs du monde économique, invités ce matin à Bonifacio, espèrent des annonces.

Du sommet international du Med 7 jusqu’aux échanges avec les élus insulaire, le programme du déplacement présidentiel se veut forcément politique. Pour autant, l’ampleur inédite de la crise engendrée par la pandémie de Covid-19 place de toute évidence le volet économique au rang des grands enjeux de cette nouvelle visite sur l’île du chef de l’État. Réunis ce lundi à Ajaccio, les représentants de la chambre régionale de commerce et d’industrie (CCI de Corse) ont d’ailleurs lancé un « appel solennel » à Emmanuel Macron, afin de pouvoir « travailler, proposer, réformer sans plus attendre, dans le plan et les cadres qu’il a ouverts, afin que cette crise ne condamne pas la Corse à la récession, nos jeunes au chômage et notre société à la détresse et au désespoir… »

Alors que la Corse apparait comme « la première région française la plus impactée » par les conséquences économiques de la crise sanitaire, les observateurs mettent à cet égard en relief le caractère « d’urgence » de la situation insulaire, où plus de la moitié de quelque 25 000 entreprises recensées est actuellement en difficulté. Parmi elle, « environ 3 000 sont menacées par un dépôt de bilan dès cet hiver, avec le risque de perdre 6 000 emplois en CDl », appuie Jean Dominici, le président de la CCI de Corse

« Pour un plan de relance spécifique »

Dans ce contexte, les acteurs locaux comptent bien faire entendre leur voix et surtout faire valoir les priorités définies dans le cadre du Plan de redémarrage économique corse, document porté par la CCI de Corse – en collaboration avec près de 1 800 entreprises, des partenaires institutionnels et politique et le cabinet EY -, et d’ores et déjà transmis au gouvernement. Comportant 70 mesures, dont douze prioritaires et « urgentes », ce plan a été chiffré à 2,5 milliards d’euros. Une somme que les acteurs économiques insulaires veulent négocier à l’aune du plan de relance « historique » de 100 milliards d’euros lancé la semaine passée au plan national. « Le montant évalué répond à un diagnostic et à des besoins concrets et impérieux pour relancer l’économie corse, insiste Jean Dominici. Dans l’immédiat, pour éviter une véritable catastrophe, nous misons sur le déblocage très rapide de 509 millions d’euros »

Cette demande fera-telle l’objet d’une annonce du président Macron ? Si le président de la CCI de Corse l’espère vivement, il avoue néanmoins n’avoir aucune certitude et être, pour l’heure, « dans l’expectative » quant aux réponses apportées par le chef de l’État. Tant sur le budget qui pourrait être alloué que sur les mesures à mettre en œuvre. « La dépendance très forte de la Corse à l’égard du tourisme qui représente 50 % des retombées économiques justifie à elle seule un plan de relance spécifique dans la mesure où tous les autres pans de l’économie seront à terme touchés, appuie Charles Zuccarelli, président régional du Medef. Nos attentes sont à ce titre fortes et nécessaires, et nous espérons donc des annonces, sachant que l’ancien Premier ministre, Édouard Philippe, avait promis au mois de mai que la Corse bénéficierait justement de mesures spécifiques. »

Des arguments que les acteurs économiques ne manqueront pas d’exposer au secrétaire d’État en charge du Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, qui doit les recevoir ce matin, à Bonifacio. « Je participerai pour ma part en visio », précise Charles Zuccarelli, estimant que le format choisi pour la rencontre, « avec près de 150 invités », risque d’être peu propice à la densité des échanges.

Un sentiment partagé par Jean Dominici, mais aussi par Bernard Giudicelli, président régional de l’Umih (Union des métiers de l’industrie hôtelière de Corse). « Sur la forme, nous regrettons effectivement de n’avoir été prévenus que mardi soir de cette réunion, ce qui ne laisse malheureusement pas présager des annonces fortes, estime ce dernier. Notre industrie touristique, qui compte environ 300 entreprises, connaît une saison 2020 marquée par une baisse de l’ordre de 40 à 60 % du chiffre d’affaires. Sans compter les effets induits par le passage en zone rouge. Nous attendons donc des mesures spécifiques de manière, avant même de la relancer à sauvegarder l’économie corse », insiste-t-il.

Des mesures spécifique et « urgentes », qui portent notamment sur le report à septembre 2021 et l’allongement de la durée des échéances des PGE (prêts garantis par l’État), sur le prolongement de l’activité partielle au moins jusqu’au mois d’avril, ou encore sur l’étalement et un calcul revu au cas par cas de charges fiscales et sociales. « Certaines professions, comme la nôtre, sont moins impactées que les hôteliers ou les restaurateurs, mais nous entendons tous être sur une même ligne solidaire », complète José Benzoni, pour le syndicat des transporteurs de Corse. Qui explique aussi réclamer « un élargissement du crédit d’impôt aux professions qui en sont exclues comme les taxis ». Autant de requêtes, parmi d’autres, plus que jamais en attente de réponses.

LAURE FILIPPI