La Lettre | EMMANUEL MACRON EN CORSE – Jean Dominici : « Participer activement à la deuxième phase du processus »

La Lettre | EMMANUEL MACRON EN CORSE – Jean Dominici : « Participer activement à la deuxième phase du processus »

À la tête d’une délégation consulaire, le président Dominici a pu échanger quelques minutes avec le chef de l’État qui lui a assuré que l’économie de la Corse serait encore soutenue et accompagnée dans les mois et les années à venir.

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  • À la tribune de l’Assemblée de Corse, Emma-nuel Macron a parlé de « moment historique ». Est-ce aussi votre sentiment ?

On retiendra assurément les propos de haute tenue échangés entre la présidente Maupertuis, le président Simeoni et le Président de la République, mais l’histoire ne sera marquée de manière indélébile et profonde que lorsque les actes succèderont aux discours et les réalités aux promesses. L’horizon est fixé, nous avons rendez-vous dans six mois pour que les réformes annoncées se traduisent de manière concrète, pour que les enjeux et défis économiques soient compris et portés de manière efficace vers l’avenir, tant pour les ressortissants d’aujourd’hui que, plus encore, pour nos jeunes appelés à nous succéder. L’histoire, la grande, c’est eux qui la vivront et l’écriront.

  • Avec quelques élus de la chambre, place Saint-Nicolas, vous avez vous-même échangé un moment avec lui. C’était important d’établir le contact ?

Oui, évidemment. Nous sommes engagés de longue date en faveur d’un dialogue franc et ouvert entre les représentants de la Corse et le Gouvernement, y compris et surtout quand les relations étaient mauvaises. La Corse et son économie ne peuvent être gardées captives des tensions et des incompréhensions, la seule voie est celle du respect mutuel et de la construction commune. Le Président de la République, très au fait de la situation insulaire, a donné les meilleurs signes pour ouvrir les perspectives que nous attendions.

  • Il a demandé à la délégation consulaire de travailler à des propositions dans le délai imparti de six mois. Comment allez-vous vous organiser ?

Nous sommes déjà organisés et mobilisés depuis longtemps, tant au sein de notre institution que de nos partenaires du Collectif des représentants du monde économique corse. Je rappelle aussi les études GoodWill Management de 2018 et 2019 qui ont permis de légitimer le Crédit d’impôt pour les Investissements et l’étude EY sur la structuration de l’économie et la relance post-Covid. Nous allons prolonger ces travaux et participer activement à la deuxième phase du processus avec la Collectivité de Corse et le gouvernement sans délaisser les dossiers et sujets conjoncturels et les difficultés du moment. Il serait en effet saugrenu de préparer l’avenir sans garantir le présent et in fine de « mourir guéris » si, par exemple, la saison touristique 2024 n’était pas mieux préparée et orientée que celle de 2023. 

  • Vous avez fait parvenir à l’Élysée un document sur les « Défis de la mise en mouvement. » Qu’en espérez-vous prioritairement ?

C’est un dossier qui doit être compris comme un point d’entrée, avec, d’une part, un exposé d’ensemble des difficultés et des contraintes spécifiques que l’économie corse doit affronter et, d’autre part, les différentes pistes pour les compenser, tant en s’appuyant sur les leviers de la fiscalité que des régimes de soutien spécifiques. Il évoque également des projets phares pour l’avenir mais la liste est loin d’être exhaustive.

  • Le Président de la République a annoncé dans son discours un PTIC de nouvelle génération. Qu’en attendez-vous, notamment pour la modernisation des ports et aéroports ?

Nos ports et aéroports fonctionnent et assurent au quotidien les échanges, tous les échanges entre l’île et le reste du monde, et donc ils garantissent l’oxygénation de notre société insulaire. Nous l’avons démontré en toutes circonstances et ce travail est reconnu au plus haut niveau comme l’a, par exemple, relevé la Cour des Comptes cette année au sujet de la robustesse et la pertinence du système aéroportuaire. De manière générale cela ne doit pas faire oublier la nécessité et même l’exigence d’investir, de moderniser, de rationaliser, d’améliorer l’ensemble des infrastructures, d’intégrer les nouvelles technologies et les équipements de pointe. La Corse est en avance dans ces différents domaines. Elle doit non seulement le rester mais accentuer ses efforts dans ce registre vital pour performer dans les décennies qui viennent. « Le Président de la République a donné les meilleurs signes pour ouvrir les perspectives que nous attendions » Cela ne doit pas nous éloigner non plus des sauts générationnels que nous devons également franchir ou rattraper par les projets de Portu Novu à Bastia ou de fond de baie à Ajaccio, mais je pense également aux aéroports qui doivent tous être améliorés ; particulièrement la plateforme de Figari qui accuse les retards d’investissements les plus importants.

  • Malgré tout, n’êtes-vous pas trop déçu que le chef de l’État n’ait pas évoqué plus concrètement dans son discours les difficultés et les attentes spécifiques à l’économie de la Corse, le nouveau modèle que vous portez ?

Non, je pense que ce n’était ni le lieu ni le moment. Mais le terrain a été préparé et, avec la confiance installée et l’apaisement retrouvé, le temps est venu désormais de construire une économie plus ouverte aux jeunes générations, plus résiliente et diversifiée, consolidée pour faire face aux transitions numériques, environnementales et sociétales… Avant cela, il faudra bien reconnaître, admettre et corriger les difficultés et contraintes de l’insularité pour mettre à parité nos entreprises et nos commerces avec ceux du continent, je rappelle que cela représente entre 9 et 12 % du chiffre d’affaires selon les secteurs et qu’il s’agit d’un gap considérable, a fortiori lorsque nous sommes exposés aux crises et retournements de conjoncture. Il n’est pas acceptable de laisser les chefs d’entreprises insulaires, commerçants et artisans, seuls face à cette situation inéquitable. Elle ne doit plus perdurer, nous devons changer d’ère… « La seule voie possible est celle du respect mutuel et de la construction commune » !

  • À Porto-Vecchio, il a en revanche déclaré que l’île avait « énormément de perspectives économiques » prononçant les mots d’« économie bleue » et de « tourisme durable ». Ça vous a rassuré ?

Oui, le Président de la République m’a d’ailleurs indiqué personnellement de vive voix que l’État continuera à accompagner l’économie de la Corse quoi qu’il arrive et nous savons qu’il est vigilant et attentif à tous les sujets économiques qu’il maîtrise parfaitement. Je lui ai répondu qu’il pouvait compter sur le monde économique insulaire en général et la CCI de Corse en particulier pour saisir ces perspectives et organiser notre mise en mouvement au sein du processus de dialogue et au-delà.

  • Avez-vous été particulièrement réceptif à sa volonté d’ancrer davantage la Corse en Méditerranée ?

Bien sûr ! Nous sommes porteurs de projets et d’initiatives dans ce domaine depuis longtemps, d’ailleurs nous venons d’être lauréats de dix projets de coopération en Méditerranée et nous comptons bien renforcer notre engagement dans cette direction. La dernière fiche du dossier que nous lui avons remis est d’ailleurs entièrement consacrée à la place que pourrait occuper la Corse en Méditerranée dans les années à venir. Dans tous ses discours, le Président de la République y fait référence et de bon augure. 

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°36 (octobre  2023) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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