La Lettre | Avec Michel Prosic, le nouveau Préfet de la Haute-Corse

La Lettre | Avec Michel Prosic, le nouveau Préfet de la Haute-Corse

Le choix assumé du terrain

Être en proximité des citoyens et des élus des petites collectivités, c’est la haute et noble idée que se fait de sa mission Michel Prosic. En cela, sa récente nomination en Corse comble toutes ses attentes…

Ses racines, son parcours universitaire et ses convictions personnelles le destinaient à une nomination en Corse. Comme une route toute tracée. Michel Prosic est né dans la vallée de la Moselle, à Hagondange, fleuron de la sidérurgie en Europe grâce à une usine prospère qui, à l’âge d’or aujourd’hui révolu, produisait un million de tonnes de fonte et employait dix mille salariés. Diplômé d’histoire, de géographie et d’aménagement du territoire, il a embrassé une carrière « de terrain » sous l’égide de deux ministères, la Culture et l’Intérieur, préférant les petites collectivités aux grandes administrations centrales. « Un choix personnel pleinement assumé car il correspond à ma vision de la mission de l’État dans les territoires, particulièrement celle qui consiste à conseiller et à accompagner les maires des petites communes qui n’ont ni les services ni les ressources humaines des grandes et auxquels je souhaite donner les meilleures clés de lecture possibles. J’ai toujours voulu être au plus près du terrain, au plus près des citoyens et des forces vives locales. C’est pour moi essentiel. » Un itinéraire atypique dans la mesure où, de l’administration, il privilégie la proximité aux hautes sphères. Le territoire de la Haute-Corse se révèle donc, pour ce haut fonctionnaire de 50 ans, un terrain de prédilection, un challenge taillé sur mesure, une nomination synchrone avec les idéaux qu’il s’est forgés, en digne dépositaire de son atavisme sidérurgique, de serviteur de l’État. Même s’il n’avait jamais foulé la terre de Corse de toute sa vie. « J’ai débarqué voici quelques semaines avec beaucoup de plaisir et d’humilité. Les enjeux politiques, économiques et sociaux, la dimension historique et culturelle, l’aménagement du territoire, les échanges transparents et constructifs avec le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, tout y est important. J’ai beaucoup à apprendre. Je le ferai avec passion, sincérité et modestie. Dans la chaleur de l’accueil qui s’est manifestée depuis mon arrivée, je veux y voir un signe de confiance… »

« ACCOMPAGNER AU MIEUX LES CHEFS D’ENTREPRISE »

Dans l’esprit de Michel Prosic, la question de l’économie est fondamentale. « Dans un territoire comme le nôtre, les entreprises sont indispensables pour le travail durable de nos concitoyens, la capacité à maintenir ou à développer une démographie, la capacité, à travers les emplois, à préserver les services publics de proximité mais aussi des commerces, des artisans, etc. Un territoire sans entreprises est un territoire fantôme. Je l’ai personnellement vécu. Lorsque la sidérurgie s’est arrêtée, tout s’est arrêté. Plus de vie. Hagondange a perdu 40 % de sa population en deux ans, les commerces, écoles et services publics ont fermé. Aussi, l’économie est, pour ce qui me concerne, un élément-clé de la mission que je m’assigne ici, celle d’accompagner au mieux toutes les initiatives des chefs d’entreprises, peu importe la filière dans laquelle ils se situent… » Bien qu’officiellement en poste depuis le 23 août, le préfet a déjà pris le soin de s’entretenir avec le président de la CCI de Corse : « Des échanges fructueux. Nous avons convenu d’élaborer un programme de visites sur le terrain. Moi-même, j’ai déjà rencontré des chefs d’entreprises dont un, tout récemment à Sisco, qui m’a expliqué l’alternative à laquelle il était confronté : investir ou stagner. J’ai prévu de me rendre sur son site de production et voir les dispositifs susceptibles de l’éclairer dans ses choix. C’est ainsi que je conçois mon rôle, détecter les pépites, repérer le potentiel de développement et proposer les outils les plus adéquats pour les accompagner… »

CYCLE CORSE-PARIS : « UN PROCESSUS IMPORTANT »

Décliner au mieux les politiques publiques nationales à l’échelle locale est son credo. Or, en Corse, il a été objectivement constaté que certaines d’entre elles étaient inadaptables voire improductives. Michel Prosic n’est pas tout à fait de cet avis. « La manière dont un territoire peut accueillir telle ou telle politique publique est toujours prise en considération. D’emblée, il est possible de réagir et d’adapter. Je rappelle que les préfets disposent d’un pouvoir d’appréciation et de dérogation en fonction des situations. » 

Le préfet participe aussi au cycle de rencontres entre la Corse et Paris sur un possible statut d’autonomie :

« Il s’agit d’un processus important, décidé par le président de la République et mis en oeuvre par la Première ministre et le ministre de l’Intérieur. Il faut laisser l’ensemble des débats avoir lieu suivant le calendrier prévu. Toutes les questions sont étudiées et approfondies en totale transparence. On verra bien le point d’atterrissage. Le meilleur sera celui qui permettra de répondre à toutes les problématiques qui se posent aujourd’hui sur notre territoire. »

Lorsqu’il ne bosse pas – et il bosse déjà beaucoup – Michel Prosic aime se ressourcer dans la littérature. Les romans et la poésie contemporaine. Une saine occupation. La lecture renforce la concentration et diminue le stress, ce qui n’est superflu lorsque l’on exerce la fonction de préfet en Corse. Même si le berceau sidérurgique où il a grandi lui a façonné un moral d’acier.

 

ARTICLE PARU DANS L’ÉDITION N°25 (octobre 2022) DE LA LETTRE – CCI DE CORSE

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Crédit photo © RAPHAEL POLETTI