Revue de presse

[CORSE-MATIN] Calvi : l’aéroport a battu en 2022 son record de trafic de passagers

Le hall de Sainte-Catherine est quasiment désert à cette période de l’année. Les deux ou trois avions quotidiens ne parviennent pas à rompre cette impression de léthargie. Pourtant, contrairement à ces apparences trompeuses, la plateforme aéroportuaire de Balagne se porte bien.

Les chiffres du trafic, les innovations technologiques, la modernisation des équipements et les perspectives d’avenir donnent le sourire aux représentants de la chambre de commerce et d’industrie, qui exploite le site.

Une conférence de presse, hier matin, a permis de détailler les raisons de cette bonne santé.

Dans l’aérien et dans le tourisme en général, l’année de référence est 2019. Les deux exercices suivants ont été très particuliers en raison de la pandémie de Covid. En 2022, les voyants sont repassés au vert.

« Le bilan de l’année 2022 est très positif, assure Pierre Negretti, le représentant CCI en Balagne. Le trafic domestique reste leader avec 296 000 passagers, soit 10 % de progression par rapport à 2019, l’année repère. Cette très nette augmentation s’explique par l’arrivée de compagnies low cost depuis 2021. Bien que décrié par certains, ce positionnement a insufflé une nouvelle dynamique. En deux ans, trois compagnies se sont positionnées et l’offre de sièges n’a cessé de croître. »

Alors que les prévisions mondiales annonçaient un retour à l’équilibre en 2025, la plateforme de Calvi a battu en 2022 son record de trafic avec exactement 346 496 passagers transportés, soit une hausse de 3 % par rapport à 2019 et de 16% par rapport à 2021.

Travaux réalisés et innovations techniques

Au niveau du trafic international, qui a mis un peu plus de temps à redécoller, le podium des destinations depuis Calvi s’établit ainsi : Cologne, Bâle et Bruxelles. Plus de 50 000 passagers en auront profité.

La Collectivité de Corse a investi 7 millions d’euros pour l’aéroport de Calvi entre 2020 et 2023. Des chantiers structurants ont été réalisés comme la création du parking sud d’aviation générale et d’affaires, qui fait passer la capacité de 12 jets à 40 postes d’aviation générale. L’aérogare a aussi été réaménagée avec une extension de la zone d’arrivée internationale, une augmentation du nombre de banques d’enregistrement et l’ajout d’un poste d’inspection et de filtrage. Le pélicandrome, dédié à la lutte contre les feux de forêt, a aussi été remis aux normes.

Concernant le volet technologique, le dispositif de contrôle des bagages en soute a été modernisé et répond d’ores et déjà aux normes qui seront en vigueur à compter de mars 2024. « Nous avons basculé, dès cette année, vers un nouveau système de détection d’explosifs, se félicite Pierre-François Novella, le directeur des plateformes aéroportuaires de Haute-Corse. Calvi est le premier aéroport de l’île à se doter de cet équipement. Nous avons aussi investi cette année dans de nouveaux locaux pour la société d’assistance aéroportuaire Casavia. Ce nouveau poste servira aussi à l’aviation d’affaires. »

Le développement de l’aéroport de Calvi a longtemps été freiné par des contraintes géographiques et météorologiques.

Le vent fréquent en Balagne vient parfois « cisailler » la trajectoire de l’avion en l’empêchant de se poser « en 18 ». c’est-à-dire dans le sens nord-sud. L’approche sud-nord, « en 36 », est rendue compliquée par le relief des montagnes qui s’élèvent rapidement autour de la plaine.

Enfin, la nuit aussi reste un problème pour les atterrissages. « Les études sur simulateur Airbus ont été concluantes pour l’atterrissage de nuit à Calvi, reprend Pierre-François Novella. Un guidage satellite, que l’on appelle approche RNP AR, permettrait au pilote de se poser de manière quasi automatique en contournant l’aéroport par l’est En cas de procédure ratée, la remise de gaz s’effectuera vers la mer. Nous avions émis l’hypothèse d’une approche par le col du Marsulinu, mais cette option concernera d’autres aéronefs moins importants. Toutefois, ces études ne valident pas encore la possibilité d’atterrir de nuit, mais nous avons bon espoir. Le décollage nocturne est lui déjà autorisé et s’est pratiqué à plusieurs reprises en 2022. La procédure a été facilitée, et l’idée est d’aller vers une banalisation des décollages de nuit pour s’ouvrir vers une plage horaire d’activité plus large, allant jusqu’à 21 heures ou plus. »

Toujours au niveau technologique, la plateforme travaille sur une décarbonisation de son escale. Les avions sur le tarmac ont besoin d’un branchement électrique pour recharger les batteries de leurs appareils embarqués. L’idée serait donc d’électrifier les aéronefs non pas sur le réseau EDF mais à l’aide d’un système associant photovoltaïque et hydrogène.

Au niveau de sa stratégie commerciale pour Calvi, la CCI a lancé un nouvel « appel à manifestation d’intérêt » ouvert à l’ensemble des compagnies européennes et dans le but d’en attirer de nouvelles. Une incitation financière de 16 euros par siège accompagne cette ambition de doper encore le trafic, en ouvrant de nouvelles destinations et en allongeant la saison.

« Notre aéroport est justifié et cohérent »

« Il y a une grosse programmation pour 2023, annonce Pierre Negretti. Nous avons un réseau de 23 lignes régulières, avec 13 lignes nationales et 10 lignes internationales, six pays desservis qui sont l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Luxembourg, le Royaume-Uni et la Suisse. Il y a sept compagnies et deux ouvertures de lignes vers Londres Gatwick et Bordeaux avec Volotea. Notre aéroport de Balagne poursuit son essor et devient plus que jamais indispensable, pour le tourisme mais aussi pour le service public et les rendez-vous médicaux notamment »

Une semaine après la parution d’un rapport de la chambre régionale des comptes soulignant « les plans stratégiques lacunaires » pour le développement de l’aéroport de Calvi (lire notre édition du 9 mars, N.D.L.R.), cette conférence de presse était, pour la CCI, l’occasion de légitimer son existence.

« L’aéroport de Calvi a toute sa place dans la région, a insisté François Acquaviva, le président du comité consultatif de surveillance des intérêts de l’aéroport. Un réel développement est en cours ici. Je me cale sur ce que dit la CRC en affirmant que le maillage aéroportuaire en Corse est cohérent, équilibré et justifié. Calvi est une plateforme attractive, dans une région enclavée. Le président Simeoni, que nous remercions pour son implication, a investi beaucoup d’argent. Cela veut dire qu’il y aura des améliorations et un service public sur la période 2024 à 2028. Investir des sommes aussi conséquentes sans maintenir les 0SP ce serait impensable. La plateforme aéroportuaire est le poumon de Balagne. C’est le plus gros employeur en été. C’est un aéroport qui existe et qui a une marge importante de développement »

Pour la chambre consulaire, le bilan est rassurant et la feuille de route claire vers une nouvelle « année de tous les records ».

JEAN FRANCOIS PACELLI

[CORSE-MATIN] Epinglée sur les aéroports de Calvi et Figari, la CCI répond

Après la publication dans nos colonnes, en date du 8 mars, des conclusions de la chambre régionale des comptes sur les concessions aéroportuaires de Figari et Calvi exercices 2017 à 2022, la chambre de commerce et d’industrie de Corse (CCI), qui gère par voie de délégation de service public, les deux structures, apporte sa position, à travers la réponse produite dans les rapports :

« Les travaux de la chambre ne pointent ni dysfonctionnement majeur, ni observation problématique, malgré les épreuves et difficultés notoires que nous avons dû surmonter pour conduire la gestion de cet aéroport au travers de la crise du Covid-19 », fait savoir Jean Dominici, président de la CCI, avant de souligner que les observations des magistrats « justifient la densité du maillage des aéroports en Corse, avec quatre plateformes. Notamment par l’insularité et le relief montagneux qui complexifie les liaisons terrestres ».

Sur la situation financière dégradée des exercices 2020 et 2021 à l’aéroport de Calvi, la CCI souligne que pour les « exercices pré et post-pandémiques, les indicateurs financiers significatifs présentent des résultats positifs, très positifs même, contrairement aux aéroports de la même strate. » 

Dans ces observations, la chambre épingle aussi le suivi et l’exécution du contrat de concession marqués par de « nombreuses insuffisances de la part du concessionnaire, la CCI de Corse. Celui-ci ne produit pas les rapports annuels obligatoires retraçant les conditions d’exécution de la concession et analysant la performance du service. Il s’est par ailleurs affranchi des modèles prévus par le contrat pour l’élaboration des documents stratégiques et programmatiques ».

Pour cette question, l’institution explique qu’il est « inexact de le mentionner de cette manière car la CCI de Corse a produit chaque année, régulièrement, les rapports obligatoires conformément aux dispositions arrêtées et validées par le concédant et a par ailleurs élaboré le plan stratégique selon le modèle prévu par le contrat ».

Même type de réponse en ce qui concerne l’endettement qui représente selon le rapport « 23 années d’autofinancement constant ». La CCI a un autre regard sur cette statistique : « L’endettement présenté de manière globale ne permet pas d’évaluer objectivement la situation financière de la concession. Il est nécessaire de distinguer la part d’endettement relative aux avances purement financières ou conjoncturelles en raison de la crise, de celles utilisées pour le financement des investissements destinés au développement de l’aéroport. »

Les critiques sur la non-réalisation du programme d’investissement, notamment pour les travaux de renforcement de la piste à Calvi amènent également une explication de la CCI, valables pour les deux aéroports : « Compte tenu des équilibres financiers fragiles de la concession, les investissements lourds ne sont déclenchés que s’il n’existe pas de solution alternative, en l’occurrence cela a été possible et réalisé sans porter atteinte aux capacités d’accueil de l’aéroport. »

La juridiction financière explique aussi que la CCI « s’est peu à peu éloignée de ses obligations contractuelles en matière d’information du concédant ». L’institution s’inscrit en faux : « Nous avons toujours produit et présenté de manière constante les documents prescrits dans le cahier des charges… » Pour rappel, la chambre s’est aussi attardée sur « le plan stratégique 2017-2020 de la CCI de Corse qui prévoyait une dépense d’investissement de 12,10 M€ financée à 60% par la Collectivité de Corse » à Calvi et 30 ME à Figari.

Là aussi, les conclusions sont négatives pour Calvi : « Les travaux les plus structurants concernant la réfection de la piste, la sécurisation de l’extrémité de l’aire de pose et l’extension des parkings des aéronefs n’ont pas été réalisés. » Mais aussi pour Figari : « Les travaux d’extension de l’aérogare, côté ville, pourtant indispensables au regard du trafic actuel, n’ont pas été effectués. »

Pour ce point précis, la CCI se défend derrière des problématiques administratives : « Si les travaux d’adaptation de l’aérogare ne sont toujours pas réalisés, et nous sommes les premiers à le regretter, c’est uniquement en raison de la délivrance tardive de l’autorisation d’engager les études du projet qui n’a été formulée par la Collectivité de Corse que le 2 décembre 2020. »

ANTOINE GIANNINI